Toute la semaine dernière, jusqu’à hier tard dans la soirée, nous retenions notre souffle : quand, comment et où l’Iran va attaquer Israël à la suite de l’attaque d’une annexe militaire iranienne à Damas. En réalité, je n’y croyais pas. Je disais il y a quelques jours que les Iraniens n’avaient pas les moyens de leurs ambitions et qu’ils chercheraient à sauver les apparences auprès des foules excitées par la haine anti-Israël.
J’imagine leur forte déception, à ces soutiens. Plusieurs dizaines de missiles, on parle de 300, et les centaines de drones lancés, sont tous partis en fumée, avant même qu’ils atteignent l’espace aérien israélien. Lancés depuis l’Iran en grande majorité, ils étaient mort-nés dans le ciel des pays arabes voisins la plupart.
Mais au-delà de cet échec iranien, je formule plusieurs enseignements et observations :
La première chose que je retiens de l’attaque des drones hier c’est qu’Israël a plus d’alliés que l’on ne veut pas nous dire. Bien sûr les États Unis, l’Angleterre, la France l’Allemagne. En réalité, ce qui est plus important encore, c’est le soutien des Émirats arabes unis, de l’Arabie saoudite et de la Jordanie. Tous les trois ont collaboré activement avec les alliés occidentaux d’Israël pour intercepter et faciliter le travail des avions qui chassaient les drones.
Or, ces pays s’opposent depuis longtemps à la mainmise iranienne sur le Moyen-Orient. Les deux premiers voulaient aller plus loin dans la normalisation avec Israël, en intégrant ou en renforçant les accords d’Abraham.
Le 7 octobre les a très fortement freinés dans leur élan. Ils ne peuvent pas se passer de leur opinion publique, et la rue arabe globalement, qui semblent secouées par rapport à ce qui passe à Gaza.
Restés discrets depuis 6 mois – malgré le fait qu’ils se savent plus enclin à normaliser avec Israël – ces trois pays arabes ont trouvé hier l’occasion de montrer leur opposition aux Iraniens. Le 7 octobre, l’Iran a éloigné ces pays de leur potentiel allié israélien. Le 13 avril, hier, le même Iran avec ses attaques aux drones, les a ramenés dans le champ des « contre les Iraniens » assumé et désormais prouvé.
Attention, de là à dire qu’ils sont revenus dans le « giron » de la paix avec Israël, il faut attendre et rester prudent. On est encore loin du compte.
Notez néanmoins que l’ambassadrice saoudienne a déclaré à New York, il y a juste deux jours, que son royaume serait ouvert voire ravi de normaliser avec Israël à condition qu’une solution à deux états soit envisagée et mise sur la table.
Un autre enseignement qu’il ne faut pas négliger : c’est la participation très timide, relativement, du Hezbollah aux attaques Iraniennes.
En réalité, hier soir, on avait tous les yeux rivés vers le sud du Liban. On avait même peur que l’attaque promise par les Iraniens se passent par l’intermédiaire de ses alliés chiites libanais au « mieux », sinon, au « pire » avec leur appui pour exercer une pression sur les deux fronts en même temps.
Force de constater que le mouvement terroriste libanais n’a vraiment pas prêté main forte à ses parrains iraniens. À part quelques roquettes, sa participation aux attaques était restée pour le moins timide, voire complètement discrète. Cela n’amoindrit pas sa volonté de nuisance qu’il continuera d’exercer dans les jours et semaines à venir et qui pourrait ouvrir un nouveau front de guerre directe. Comme je l’ai toujours dit néanmoins, le Hezbollah n’a pas les moyens de ses ambitions, avec une forte opposition dans la société libanaise et une situation économique catastrophique.
Puis, il y a la réaction syrienne qui est encore plus discrète. Le régime syrien avait clairement fait savoir que son territoire ne servirait pas de base pour une attaque Iranienne. C’était deux jours avant l’attaque aussi. J’avais expliqué cette volonté de se démarquer des Iraniens par le fait qu’Assad sait pertinemment la dangerosité d’une guerre directe pour lui avec Israël. Lui aussi, il n’en a point les moyens. J’avais ajouté que sans doute dans la nouvelle configuration que pourrait avoir le Moyen-Orient après l’élimination du Hamas, Assad souhaiterait sans doute protéger ses bases-arrière et négocier éventuellement une « sortie honorable » pour lui et sa famille.
Je pense enfin que les attaques iraniennes vont accentuer l’isolement de l’Iran. Ils vont surtout casser le mythe de sa force auprès de ses soutiens, et de sa dangerosité auprès de ses adversaires comme Israël et les pays arabes
Au fond, après avoir terrorisé tout le monde, ne serait-ce que psychologiquement, avec sa riposte tant redoutée, l’Iran et ses drones ont fait un gigantesque pschitt.