L’islamisme avance en France, la République hésite. Ce texte mêle mon témoignage de Syrien et une analyse critique de l’inaction française face aux Frères musulmans, au Qatar, à l’Iran et aux compromissions politiques qui nourrissent le déni.
Une menace connue, mais toujours niée
J’ai grandi en Syrie, dans une société rongée par l’activisme des Frères musulmans. J’ai vu de mes yeux comment, sous couvert de religion, ils avançaient masqués, infiltraient les associations, les écoles, les mosquées, les réseaux associatifs, jusqu’à contaminer les institutions et le corps de l’État. Ce que la France feint de découvrir aujourd’hui, je le connais depuis l’enfance. L’entrisme, la dissimulation, la victimisation : tout cela fait partie des méthodes fréristes. Et pourtant, malgré des rapports documentés et des alertes répétées, certains persistent à nier le danger.
Le rapport Brugère et l’inaction présidentielle
Le dernier rapport d’Alexandre Brugère, préfet des Hauts-de-Seine, « Combattre l’islamisme sur le terrain », dresse un constat implacable. Il montre que l’influence des Frères musulmans ne se limite pas à quelques individus isolés : un tiers des mosquées de son département sont sous influence islamiste ou visées par des tentatives de prise de contrôle. Des associations « culturelles », des écoles coraniques, des clubs sportifs, des commerces communautaires, des réseaux sociaux, jusqu’aux conseils municipaux : tous ces espaces sont investis. Et cela ne concerne pas des « dizaines » d’activistes marginaux, comme certains veulent le faire croire, mais des réseaux organisés, qui diffusent une idéologie hostile aux valeurs républicaines.
On entend déjà le refrain : « Les Frères musulmans ? Un fantasme. » C’est une erreur majeure. Leur stratégie ne repose pas sur le quantitatif, mais sur le qualitatif : infiltrer les lieux-clés, empoisonner à petit feu les esprits, et enraciner leur idéologie dans la jeunesse d’origine arabo-musulmane. Leur force est dans la contagion lente, la victimisation permanente, la défiance organisée envers l’État et la République.
Ce rapport aurait dû provoquer un électrochoc. Emmanuel Macron avait promis des mesures concrètes dans la foulée du rapport Brugère. Une « réponse de l’État », avait-il dit, serait annoncée au milieu du mois de juin. Or nous sommes à la fin du mois… et toujours rien. Silence radio. Aucune annonce. Aucune réforme. Aucune action. Une promesse de plus, évaporée dans l’indifférence générale. La menace, elle, est bien réelle, mais l’exécutif reste tétanisé à l’idée de nommer clairement l’ennemi.
Qatar, AJ+ et l’entrisme idéologique toléré
Et pendant ce temps, il faut regarder ce qui se passe sur nos écrans : la chaîne AJ+ en français, vitrine d’Al Jazeera, financée par le Qatar, diffuse quotidiennement des contenus biaisés, antisémites, pro-Hamas, sous couvert de « cause palestinienne ». C’est un canal d’entrisme idéologique ciblant directement la jeunesse française. Que la France laisse ce média frériste diffuser sa propagande est un échec grave. Pire encore : Emmanuel Macron, au lieu de dénoncer ce rôle toxique, a récemment publiquement remercié le Qatar, et son « ami le prince », pour son action dans la région. Le même Qatar qui finance les Frères musulmans, soutient le Hamas, héberge les chefs islamistes et manipule l’opinion européenne.
Iran : répression, frappes et silence diplomatique
Et pendant que les États-Unis et Israël frappaient les installations nucléaires iraniennes pour empêcher un régime fanatique d’accéder à la bombe, Emmanuel Macron, lui, continuait d’appeler à la négociation avec les mollahs, refusant toute idée de pression réelle ou de changement de régime, au nom d’une prétendue stabilité régionale. Toujours le même prétexte : éviter le chaos. Comme si le chaos n’était pas déjà orchestré par Téhéran depuis des années — au Liban avec le Hezbollah, en Syrie avec les milices, en Irak, à Gaza, et jusque sur le sol israélien avec les missiles. Aujourd’hui, la crise semble s’être refermée.
Mais le régime iranien, lui, arrête par centaines ses propres citoyens accusés d’avoir critiqué la guerre, d’avoir manifesté ou simplement d’avoir douté du récit officiel. Et que fait la France ? Rien. Pas un mot de Macron sur cette vague de répression. Rien sur les slogans haineux criés dans les rues de Téhéran.
Mais toujours des sermons adressés à Israël. Inlassablement. Et, en parallèle, des remerciements appuyés et des marques de soutien à son « ami » qatari. Faut-il donc être un prince pour mériter les faveurs et la bienveillance du président Macron ?
La gauche radicale et ses aveuglements volontaires
La gauche radicale, elle, pousse la compromission encore plus loin : entre deux appels incantatoires à la paix, elle minimise la dangerosité des mollahs, allant jusqu’à affirmer que ce n’est pas l’Iran qui menace la stabilité du Moyen-Orient, mais Israël. Elle prétend que la République serait complice d’un prétendu « génocide » à Gaza, et détourne les yeux lorsque les slogans « Mort aux Juifs » résonnent dans ses propres cortèges. Elle préfère dénoncer les alertes au séparatisme comme une forme de racisme d’État, plutôt que de regarder en face les islamistes qu’elle excuse, qu’elle relaie, et parfois qu’elle applaudit.
Le rapport Brugère est clair : les Frères musulmans ne défendent pas l’islam, ils le trahissent. Ils instrumentalisent la foi pour imposer un projet politique, rejettent la laïcité, l’égalité entre les sexes, la liberté de conscience. Ils utilisent la rhétorique de l’« islamophobie » pour intimider, inverser la charge, imposer le silence. J’ai vu, en Syrie, comment ces discours de « pureté religieuse » servaient à radicaliser et à préparer le chaos. La France risque le même scénario.
Et que voit-on ces derniers jours ? Pendant que des alertes sérieuses sont lancées, le recteur de la Mosquée de Paris s’empresse de dénoncer le rapport, au nom d’une prétendue « dignité des musulmans ». Non, monsieur le recteur : protéger les musulmans, c’est les protéger des islamistes, pas des préfets qui alertent. Et pendant ce temps, l’imam des Bleuets, condamné pour apologie du terrorisme, reprend fièrement ses prêches. Le signal envoyé à la jeunesse est catastrophique.
L’imam Chalghoumi a raison : on ne peut pas prétendre défendre la République tout en donnant tribune à ceux qui la détruisent. On ne peut pas dénoncer le séparatisme d’un côté, et fermer les yeux sur ceux qui l’alimentent de l’autre. Ceux qui prétendent défendre « les musulmans » en soutenant ces courants sont des complices. Ils trahissent les musulmans eux-mêmes, qui sont les premières victimes de l’islamisme.
Islamisme : entre lucidité et renoncement politique
Le monde arabe lucide, lui, a tranché : Égypte, Émirats, Jordanie, Tunisie – tous ont interdit les Frères musulmans. Même la Syrie d’Al Charaa, sous pression des Américains et des pays du Golfe, ferme ses portes à ces réseaux. Et pendant ce temps, la France tergiverse, paralysée par l’obsession de ne pas « stigmatiser ».
Il est temps de choisir : La République ou le communautarisme.
La liberté ou la soumission.
La lucidité ou le déni.
Par Faraj Alexandre Rifai, essayiste, auteur de Un Syrien en Israël