J’étais invité hier sur le plateau de Nathalie Nagar à @I24News à Tel Aviv. Qui l’aurais cru ? Moi le Syrien imbibé de la haine d’Israël dans mon enfance et jeunesse syrienne, j’interviens sur une chaine israélienne pour revendiquer mon entier soutien à Israël mais aussi à la cause des Juifs en Israël et dans le monde ? C’est incroyable, et pourtant vrai.
En réalité, ce soutien n’a pas toujours été une évidence. Loin de là. Il était passé par beaucoup de résistance idéologique et de négation. Si on m’avait demandé d’intervenir sur le même plateau il y a trente-huit ans, à mon arrivée en France, c’est sûrement un anti-israélien farouche qu’ils auraient eu en face, rempli de beaucoup d’aprioris et préjugés antisémites.
Mais quelques déclics dans mon enfance syrienne et dans ma deuxième vie française m’ont fait prendre conscience de l’horreur et de la gravité de l’antisémitisme dans lequel je vivais, des déclics et des événements qui ont façonné mon cheminement.
Tout a commencé lors de la guerre de Kippour en 1973. J’avais huit ans. L’enfant que j’étais était fier de cette « guerre glorieuse » contre l’ennemi sioniste. C’est à ce moment-là, que ce mot « sioniste » a sans doute été enregistré dans ma mémoire d’enfant. C’était le mal absolu, le diable, ou le monstre. Rapidement, j’ai capté d’autres « synonymes », comme le mot « Juifs ». Quelques jours après le déclenchement de la guerre plus précisément; lorsqu’un oncle lointain était venu nous rendre visite. Il avait dit devant nous les enfants :
-« dommage que Hitler n’avait pas terminé son travail, on n’en serait pas là aujourd’hui (la guerre contre Israël) »
Ma mère, qui était une féministe et communiste convaincue lui avait répondu sur le coup
-« tu sais, s’il l’avait terminé comme tu dis, tu aurais été le prochaine sur la liste ».
Quand il était parti, elle nous a dit à nous les enfants
-« ne l’écoutez pas, c’est un fanatique »
50 ans après, je lis les mêmes mots dans les commentaires et sur les réseaux sociaux, prononcés par des jeunes n’ont peut-être même pas vingt ans. Moi à l’époque, je n’avais pas une idée précise de son « travail »… Mais ces jeunes qui répètent aujourd’hui la même phrase, mot à mot, avec une telle facilité, une telle banalité, ignorent-ils vraiment ce qui s’était passé durant la Shoah ?
Heureusement pour moi, ma mère a semé une graine ce jour-là, en nous disant « ne l’écoutez pas, l’oncle, c’est un fanatique »
Je dis aux jeunes d’aujourd’hui, n’écoutez pas les fanatiques, regardez toutes ces années, le discours de la haine et de la terreur qu’ils prêchent… Pour aller où ? Pour vous mener où ? au paradis ? Je ne crois pas. En réalité, ils vous font vivre dans un perpétuel mensonge, dans un perpétuel enfer ; vers plus de pauvreté et de violence ?
Et vous serez toujours les perdants !
A quoi bon ?
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Merci à ma mère, syrienne, féministe et humaniste, d’avoir semé cette première graine en moi
Merci à la République, à la France, de m’avoir permis de la faire pousser … grandir ailleurs
A suivre …