Selon plusieurs sources concordantes (Kann News, Bloomberg, i24NEWS), la France, en lien avec l’Arabie saoudite, participerait à des discussions visant à obtenir le désarmement du Hamas, en échange de son maintien comme acteur politique à Gaza. Ce scénario, s’il se confirmait, marquerait un tournant stratégique lourd de conséquences. Car il pose une question essentielle : peut-on construire la paix en recyclant ceux qui l’ont systématiquement sabotée ?
Le contexte est connu : le Hamas est militairement affaibli, contesté à Gaza même, et de plus en plus isolé. Pourtant, au lieu d’en tirer les conséquences politiques, certains pays dont la France, envisagent aujourd’hui de lui offrir une sortie « honorable ». Le projet serait d’imposer une démilitarisation, sans pour autant écarter le Hamas du champ politique. Autrement dit : désarmer la main, mais blanchir l’idéologie. Une telle approche, si elle devait aboutir, reviendrait à sauver ce mouvement au moment même où il commence à vaciller.
Ce ne serait pas une première. En 2006, le Hamas, issu directement des Frères musulmans, s’était déjà présenté sous une façade « républicaine » avec la liste « Changement et Réforme ». Cette stratégie d’apparence avait alors trompé une partie de la communauté internationale. Elle lui avait permis d’accéder au pouvoir tout en poursuivant son double discours : gouvernance en surface, terrorisme en profondeur. Dix-neuf ans plus tard, malgré des milliers de roquettes, plusieurs guerres et un pogrom le 7 octobre 2023, voilà que l’on rejouerait la même scène, avec cette fois la caution active d’une grande démocratie occidentale.
Or, le Hamas n’est pas un simple mouvement armé qu’on pourrait neutraliser par un accord. C’est une organisation profondément idéologique, dont la charte révisée continue d’appeler à la destruction d’Israël, et dont les méthodes, boucliers humains, endoctrinement des enfants, usage systématique de la terreur, sont incompatibles avec toute forme de vie démocratique. Croire qu’il pourrait devenir un parti modéré par la seule vertu d’un désarmement supervisé, c’est confondre le vernis avec la structure.
Dans le même temps, la France multiplie les gestes en faveur d’une reconnaissance rapide d’un État palestinien. Mais dans ce scénario, avec quel leadership ? Doit-on envisager un futur État partiellement gouverné par un Hamas « reconverti », mais jamais repenti ? Ce serait une trahison des principes que Paris affirme pourtant défendre : la sécurité d’Israël, la coexistence pacifique et la lutte contre l’extrémisme. Ce serait aussi une insulte faite à ceux qui, dans les territoires palestiniens comme ailleurs, aspirent à une alternative au cycle sans fin de la haine.
Cette démarche se fait, en outre, contre l’avis d’Israël, principal concerné par ce conflit. L’État hébreu, dont des citoyens sont toujours otages, refuse catégoriquement toute réintégration du Hamas dans le jeu politique. Dès lors, pourquoi la France insiste-t-elle ? Pour peser diplomatiquement ? Pour se positionner en interlocuteur du monde arabe ? Pour flatter ses alliés du Golfe ? On peut comprendre la tentation d’exister sur la scène internationale. Mais pas à n’importe quel prix. Pas en désavouant un allié. Pas en légitimant un ennemi.
On comprend mieux, dans ce contexte, les remerciements officiels du Hamas à Paris. On comprend aussi pourquoi tant d’observateurs s’interrogent sur les incohérences de notre diplomatie : complaisance vis-à-vis du Qatar, entretiens officiels avec des figures islamistes, réception controversée d’un ex-dirigeant d’Al-Qaïda en Syrie. Ces signaux brouillent le message français, affaiblissent notre parole, et créent un malaise croissant chez nos partenaires.
La paix est un objectif noble. Mais elle ne peut reposer sur la confusion morale ni sur le recyclage des bourreaux. On peut vouloir dialoguer sans tout accepter. Encore faut-il ne pas perdre de vue ce que sont la lucidité, la cohérence, -et l’honneur.
Source de l’information Bloomberg