Alors que la guerre en Syrie déchire un peuple et broie des innocents, un livre dérange, éclaire, et interpelle. « Embrasser l’ennemi » (לחבק את האויב) est le témoignage du lieutenant-colonel Eyal Dror, un officier israélien qui a dirigé l’opération humanitaire “Bon Voisin” à la frontière israélo-syrienne entre 2016 et 2018.
Ce n’est pas un manifeste politique, ni une justification militaire. C’est un récit humain, douloureux, et profondément moral. Un récit qui pose une question simple : qui, dans cette guerre, a tendu la main aux civils syriens ?
Israël, l’ennemi qui soigne
Entre les lignes du livre se dessine une scène presque irréelle : des soldats israéliens, sur la ligne de front du Golan, accueillent des femmes syriennes enceintes, des enfants blessés, des vieillards épuisés.
Ils les soignent, les nourrissent, les accompagnent — puis les raccompagnent, en silence, de l’autre côté.
L’opération « Bon Voisin » a permis de soigner plus de 5 000 civils syriens, d’acheminer plus de 1 700 tonnes de nourriture, d’ouvrir un hôpital de campagne, et de créer des ponts de solidarité entre deux peuples que tout, jusque-là, opposait.
Eyal Dror, qui a grandi avec l’image du Syrien comme ennemi, raconte la transformation de ses certitudes :
« Quand vous tenez dans vos bras un bébé syrien blessé, il n’y a plus de propagande. Il n’y a plus que l’humain. »
Pas un geste pour les islamistes
Contrairement à certaines accusations relayées dans les milieux pro-Assad ou islamo-gauchistes, ce livre montre clairement que l’aide israélienne ne visait pas les islamistes, mais les civils, y compris des villages druzes ou sunnites pris au piège entre le régime et les groupes radicaux.
Aucune arme n’a été livrée, aucun soutien à des groupes extrémistes. Israël a maintenu une ligne humanitaire stricte, tout en poursuivant, de manière transparente, un objectif stratégique : stabiliser sa frontière et empêcher les milices iraniennes et le Hezbollah de s’implanter durablement dans le sud syrien.
Et les autres ? Le silence ou la complicité
Ce livre met aussi en lumière un contraste saisissant : alors qu’Israël soignait des enfants syriens, la communauté internationale se taisait. Les capitales arabes regardaient ailleurs. Les ONG occidentales n’osaient pas s’aventurer dans cette zone. Et ceux qui, ailleurs, prétendent défendre les droits humains… n’avaient plus rien à dire.
Pis encore : les mêmes qui s’indignent bruyamment à chaque action israélienne, ceux qui pleurent les chefs du Hezbollah et dénoncent le “colonialisme sioniste” à chaque occasion, sont restés muets face aux souffrances de ces civils. Pourquoi ? Parce qu’ils étaient massacrés par les mauvais bourreaux : les islamistes.
Ce livre renvoie chacun à ses responsabilités. Et à ses silences.
Une action humanitaire, mais pas naïve
Dror ne prétend pas qu’Israël a agi sans intérêt. Il reconnaît que l’opération visait aussi à éviter l’infiltration ennemie, à bâtir une image plus positive d’Israël, et à offrir une alternative locale à l’influence iranienne.

Mais la lucidité stratégique n’annule en rien la sincérité de l’acte humanitaire. Elle le renforce, même. Israël n’a pas choisi la facilité. Elle a pris un risque : celui de soigner l’enfant d’un ennemi, celui de voir ses soldats critiqués, celui d’agir quand d’autres parlaient.
Une leçon pour les cyniques
Le livre d’Eyal Dror est aussi un miroir tendu à ceux qui se disent « amis du peuple syrien » mais n’ont rien fait — ou pire, ont soutenu des groupes islamistes qui ont ensanglanté la Syrie.
Il dit ceci :
Israël a agi. En silence. Sans propagande. Sans caméra. Pendant que d’autres distribuaient des tweets et des indignations sélectives.
Le livre invite à la décence. À ne plus inverser les rôles. Et à reconnaître une vérité simple : parfois, celui qu’on appelait l’ennemi devient le seul à vous tendre la main.
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« Embrasser l’ennemi » est un livre essentiel. Pas parce qu’il défend Israël — il n’en a pas besoin — mais parce qu’il défend une idée que trop de gens ont abandonnée : l’humanité, même en temps de guerre.
Dans un monde saturé de slogans, de positions binaires et de haine recyclée, ce témoignage offre une respiration. Et une leçon : ce ne sont pas les discours qui sauvent des vies. Ce sont les actes
