En France, l’antisémitisme progresse aussi par les discours politiques : en diabolisant Israël, ils alimentent la haine des Juifs au quotidien.
J’écris ce billet en tant que Syrien qui a grandi dans un environnement saturé de haine des Juifs et d’Israël. Cette haine, je l’ai respirée enfant, elle m’a été inculquée à l’école, dans les médias, dans la rue. J’ai dû m’en libérer, au prix d’un long cheminement. C’est pourquoi je sais reconnaître, aujourd’hui, quand une société reprend, parfois sans même s’en rendre compte, les mêmes schémas idéologiques qui nourrissent l’antisémitisme.
La France face à l’antisémitisme : la limite du sécuritaire
Le Président Macron a affirmé récemment que la France protège et protégera toujours les concitoyens juifs de France. On me dit que l’État français « fait ce qu’il peut » : protection des synagogues, présence policière, discours officiels. Je ne le nie pas. Mais je le sais d’expérience : on ne combat pas une idéologie avec des policiers. On ne peut pas mettre un agent derrière chaque Juif de France. La sécurité est nécessaire, mais elle ne suffit pas.
Quand les symboles comptent autant que les actes
Ce qui nourrit la haine, ce sont les mots, les symboles, les postures politiques prises, pour différentes raisons, par nos responsables politiques. Quand un président réserve l’essentiel de ses critiques à Israël, quand il cherche à l’isoler face à ceux qui veulent sa destruction, quand il reprend sans distance les accusations du Hamas et sa propagande, quand il reconnaît un « État palestinien » dont la charte, la carte de la Palestine entière affichée comme emblème, et les dirigeants refusent par principe la présence juive, il envoie un signal clair : cette cause défendue par le Hamas et les Islamistes serait juste. Pire, cela redonne de l’écho aux pires ennemis d’Israël : l’état hébreu serait le coupable, Israël serait l’oppresseur. Ceux qui ont commis le pogrom seraient les libérateurs. Ils sont récompensés. Et ainsi, ils pourraient même continuer.
Dans la rue arabe, comme dans le camp des pro Palestinien en Occident, ce discours se traduit immédiatement : chaque Juif devient une cible, représentant, sinon comptable de la politique israélienne et … « Sioniste ». Dans la bouche de certains, ce mot n’a rien d’un compliment ni d’une reconnaissance. Bien au contraire. C’est une insulte. Une promesse de haine.
L’inversion morale
J’ai connu cette inversion dans le monde arabe : le Palestinien présenté comme la victime absolue et le Juif comme le bourreau par essence. Or je la retrouve aujourd’hui au cœur du discours politique français, maquillée certes, mais fortement relayée par certains responsables politiques, dans les campus, les universités, les associations et jusque dans les institutions de la République.
En adoptant ce narratif, la France se rend complice d’une vision binaire et fausse qui attise la haine des Juifs, au lieu d’aider ceux qui en sont nourris à s’en libérer.
Le poids d’une immigration imprégnée d’antisémitisme
À cela s’ajoute un autre facteur qu’il serait malhonnête d’ignorer : une partie importante de l’immigration venue du monde arabo-musulman a grandi dans une culture politique et religieuse profondément imprégnée d’antisémitisme. J’en suis issu, je l’ai vécu, je sais combien cette vision est inculquée dès l’enfance.
Au lieu d’aider ces populations à se libérer de ce poison, nombre de responsables politiques français, de droite, de gauche ou de centre, préfèrent leur parler en miroir, flatter leurs rancunes ou détourner le regard, par calcul électoral ou par lâcheté. En ne proposant aucune pédagogie claire, en n’osant pas nommer le problème, ils laissent prospérer une haine importée, qui s’ajoute aux fractures internes déjà existantes.
Ce que j’ai appris en me libérant de l’antisémitisme
J’ai compris que l’antisémitisme n’est pas une opinion, c’est un poison et un délit. Il détruit ceux qui le portent autant que ceux qu’il vise. La France, en reprenant les rhétoriques des pires antisémites au Proche-Orient, alimente ce poison sur son propre sol.
En accablant Israël au lieu de soutenir son droit légitime à se défendre contre des terroristes barbares, en répétant les accusations de ses ennemis comme des évidences, elle met en danger les Juifs de France et trahit son propre héritage : celui de l’émancipation et de l’égalité.
FAR | Faraj Alexandre Rifai.